Mobilité durable : le numérique ouvre de nouveaux horizons
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La mobilité durable n’est plus seulement l’affaire des constructeurs d’automobiles : elle implique aussi les comportements des usagers face aux services nouveaux qui leur sont proposés et l’aménagement de l’espace public, tout particulièrement dans la « ville intelligente ». A la base de tous ces changements, il y a le numérique1 et la gestion des données (data) de plus en plus omniprésentes.
© getty/ metamorworks
La recherche d’une mobilité « durable » vise à réduire la consommation de carburants (donc les pollutions diverses et les émissions de CO2), à améliorer la sécurité et aussi à rendre la vie acceptable dans les grandes métropoles, puisqu’elles vont rassembler de plus en plus de populations dans les 30 ans à venir. Elle concerne aussi bien les transports terrestres que maritimes ou aériens, pour les personnes comme pour les produits.
Voici, sous forme de glossaire, dans le secteur déterminant de l’automobile, quelques-uns des concepts nouveaux aux trois niveaux identifiés : les véhicules eux-mêmes, les nouveaux usages, l’aménagement de l’espace public.
La responsabilité des constructeurs : le numérique dans l’automobile
L’assistance à la conduite
Il s’agit de dispositifs d’abord électroniques puis de plus en plus fondés sur l’intelligence artificielle qui aident le conducteur : dispositif d’alerte au franchissement de ligne ou au dépassement de vitesse, manœuvres de parking automatiques, images permettant de supprimer les rétroviseurs, régulateur de vitesse, géolocalisation et détermination automatique du bon itinéraire. De nouveaux systèmes prévoient une «bulle de confort thermique» ou de climatisation pour chaque passager… Pour cela, les voitures intègrent radars, capteurs, caméras, scanners et microprocesseurs.
Il ne s’agit pas simplement de « gadgets » ! La suppression des rétroviseurs et de la lunette arrière permettront un meilleur aérodynamisme, donc des économies. Un bon système de chauffage/climatisation est essentiel pour réduire la consommation, notamment dans les voitures électriques qui n’ont plus l’apport en
du moteur thermique.
La voiture « autonome » ou « semi-autonome »
C’est la suite logique de l’assistance à la conduite. Les constructeurs entendent procéder par « couches successives » : passer à une conduite automatique dans les bouchons, puis sur des portions d’autoroute, puis en ville, avec le maintien d’un conducteur qui puisse reprendre le contrôle en cas de besoin. Des véhicules autonomes sont déjà testés sur des boucles ou des sites clos, comme les aéroports, les parcs d’attraction, les centres logistiques, les chantiers. Une expertise se révèle indispensable : celle de la cartographie numérique qui permet un repérage au centimètre près de tous les éléments d’un espace afin d’y guider le véhicule.
Gains attendus : plus de sécurité, plus de fluidité et moins d’embouteillages, donc moins de consommation.
La responsabilité des utilisateurs : de nouveaux usages
Le covoiturage
C’est l’utilisation d'une même voiture particulière par plusieurs personnes effectuant le même trajet. Il peut s’appliquer sur de longues distances (du type Blablacar) ou des trajets courts domicile-travail. Les réservations se font généralement sur site internet et par applications mobiles.
L’autopartage
C’est un système où des véhicules sont mis à la disposition de conducteurs pour une durée limitée. Il peut s’agir d’une association de particuliers qui achètent des véhicules et les gèrent en commun. Le plus souvent, il s’agit de sociétés qui mettent à disposition une flotte de véhicules que l’on emprunte et que l’on restitue dans des stations dédiées. La réservation par application mobile couplée à des systèmes intelligents placés à bord du véhicule permet une utilisation en free-floating : le véhicule est pris et laissé à l’endroit de son choix. Ce qui est possible pour les voitures l’est bien sûr pour les scooters, les vélos, les trottinettes, etc…
L’économie du partage
La possibilité ouverte aux individus et aux professionnels de se mettre en contact direct grâce aux nouvelles technologies de réseaux, a donné naissance aux sociétés de VTC (voitures de transport avec chauffeur). La notion d’utilisation d’un véhicule supplante alors celle de possession. Le constructeur ne vendra plus seulement un « nombre de voitures », mais aussi des « kilomètres parcourus » dans des systèmes de transports partagés. Selon une étude de la banque Morgan Stanley2, les voitures partagées et les VTC représentaient 4 % des kilomètres parcourus mondialement en 2015 avec une prévision de 26 % en 2030.
La responsabilité des gestionnaires de réseaux : l’aménagement de l’espace public
La gouvernance de l’urban data
C’est la gestion des masses de données numériques que collectent les villes. Ce big data permet de gérer et prévoir les flux de circulation, de commander les feux de circulation, d’organiser les transports en commun. Partagées avec les usagers, ces données leur permettent de calculer les itinéraires, et d’accéder à un nombre grandissant de services. Exemple d’un projet à l’étude : si toutes les voitures étaient connectées, et en liaison avec les feux de circulation, elles redémarreraient toutes au même moment au passage du vert, comme si elles formaient un train… Fluidité garantie. Singapour a un système global de navigation par satellite permettant de mieux réguler les trains, les bus et les voitures privées qui seront toutes équipées d’appareils de réception. On parle alors de villes intelligentes (« smart cities »)3.
L’intermodalité
C’est la combinaison de plusieurs modes de transport pour effectuer un déplacement entre deux points. La gestion des data permet de mieux coordonner les horaires et de fluidifier les passages d’un mode à l’autre. Par exemple, relier un réseau en surface de tramway circulaire avec les stations d’un métro souterrain rayonnant. Dans le métro parisien, une application vous indique à quel niveau du quai se trouve le couloir de correspondance que vous devrez prendre ! Pour faciliter le passage d’un mode de transport à l’autre, des « passes mobilité » sont apparus, qui permettent de payer plusieurs opérateurs différents de transport avec la même carte ou la même application mobile.
Transports à la demande
Les transports à la demande (TAD) sont des transports collectifs qui n’ont pas nécessairement d’itinéraires fixes et d’horaires précis. Un système automatisé se charge de la réservation et de la mise à disposition de mini-bus aux voyageurs pour un besoin précis. Il est bien adapté à des personnes âgées ou non motorisées. On parle aussi de vanpooling ou de buspooling.
« Le dernier kilomètre »
Cette expression désigne l'ensemble des opérations nécessaires pour assurer les derniers segments d’une chaîne de distribution de biens ou de services. La problématique a pris encore plus d’importance avec l’essor très rapide du e-commerce, qui apporte les colis directement chez le consommateur. Le coût de ce dernier maillon est souvent important. Après le dépôt de colis chez des commerçants du quartier, la livraison par vélos ou triporteurs réapparaît dans de nombreuses villes européennes. L’utilisation de drones est testée dans des zones plus périphériques.
Sources :
- Numérique ou digital ? « Digital » est un anglicisme (« digit » signifiant « chiffre »). « Digital » en français signifie à l’origine « relatif au doigt », comme dans « empreintes digitales ».
- Rapport Morgan-Stanley (en anglais uniquement)
- Voir notamment le site de la Fabrique de la Cité