Shanghai : nouvelle politique écologique chinoise
Lecture 10 min
Symbole de l’ouverture de la Chine au monde et de sa croissance exponentielle, la grande métropole de Shanghai est devenue un laboratoire et une vitrine des avancées écologiques du pays dans son effort de réduire la pollution atmosphérique et de maîtriser son urbanisation.
© Thinkstock - Le panorama urbain de Shanghai est devenu l’un des plus célèbres du monde, rivalisant avec celui de Manhattan à New-York.
Le développement de Shanghai a suivi les soubresauts de la politique centrale du pouvoir chinois.
- Porte d’entrée de la Chine pour l’influence occidentale dès la fin du XIXe siècle, Shanghai se referme après 1950 avec le régime communiste de Mao Tse Toung. Son essor est volontairement bloqué par les dirigeants de Pékin.
- À partir de 1980, l’ouverture au modèle capitaliste menée par Deng Xiao Ping a pour effet une croissance débridée. Shanghai reprend de l’influence au sein du pouvoir central de Pékin et repart de l’avant. Son port, à l’embouchure du fleuve Yang-Tsé qui traverse la Chine, retrouve son rôle international et est aujourd’hui le plus grand terminal de conteneurs du monde, devant Singapour. La ville devient aussi la vitrine financière du pays, rivalisant avec Hong Kong.
- La libéralisation économique provoque un impressionnant exode rural : plus de 500 millions de Chinois convergent vers les villes. Shanghai passe de 6 millions d’habitants en 1980 à près de 24 millions en 2015. Le rythme est encore de 300 000 nouveaux arrivants chaque année.
- Au début de la deuxième décennie du siècle, dans un contexte où les villes chinoises deviennent ingérables et gravement polluées, le pouvoir de Pékin adopte une politique qui ne met plus l’accent sur la seule croissance, mais insiste sur un . Shanghai, qui a accueilli en 2010 l’exposition universelle, est chargée de mettre en scène la nouvelle politique « écologique ». Ses résultats concrets sont encore difficiles à évaluer et à chiffrer, car, contrairement à d’autres grandes métropoles mondiales qui ont introduit de nouvelles formes de gouvernance très transparentes, les décisions chinoises restent très centralisées et souvent opaques.
La Shanghai Tower, conçue pour économiser l’énergie.
À partir de 1993, Shanghai développe une ville nouvelle destinée aux affaires, Pudong, et fait le choix d’un urbanisme vertical. Des forêts de tours de bureaux jaillissent de terre en quelques années. Un nouvel aéroport, un port en eau profonde, des universités, des éco-parcs industriels, des télécommunications ultra-modernes visent à attirer des milliers d’entreprises étrangères, notamment high tech.
Pudong illustre cette ambiguïté d’une croissance chinoise fière d’elle-même (avec ses façades saturées d’éclairages publicitaires et ses équipements dévoreurs d’énergie) et d’une nouvelle recherche d’ . La Shanghai Tower, inaugurée en septembre 2015, est à la fois symbole de gigantisme (avec 632 mètres, elle vient juste derrière la Burj Khalifa de 828 mètres à Dubaï) et d’innovations écologiques. La tour a une « double peau » : une première enveloppe qui entoure les espaces de bureaux et de commerce, une deuxième enveloppe de forme torsadée. Entre les deux, un vide avec des espaces végétalisés qui bénéficient de l’air frais de la climatisation centrale pendant les étés torrides, de l’air chaud pendant les hivers froids, et jouent ainsi un rôle de tampon thermique. Une entaille en spirale sur toute la hauteur du gratte-ciel collecte l’eau de pluie destinée à la climatisation. Des dizaines de micro-éoliennes à axe vertical sont installées au-delà de 500 mètres d’altitude.
Réduire la pollution et la saturation du trafic automobile
La période d’industrialisation galopante a, comme dans toute la Chine, aggravé la pollution, tandis que l’essor des revenus des ménages a fait grimper en flèche le parc automobile. La première politique adoptée a été d’éloigner les entreprises polluantes. L’ouverture à l’été 2016 d’un grand parc Disneyland à Shanghai a conduit à la fermeture de 153 sites industriels polluants des environs. Dans le même temps, des normes plus strictes ont été introduites et des éco-parcs industriels ont été créés, comme le Shanghai Chemical Industry Park (SCIP), à une quarantaine de kilomètres (km) de la ville.
Deuxième axe : un développement majeur des transports publics, avec le Shanghai Metro. Sa caractéristique est d’avoir été conçu pour croître de façon continue. Avec 4 lignes au départ en 1993, il est aujourd’hui long de 600 km avec 350 stations, et sera de 800 km et 500 stations en 2020, ce qui devrait en faire le réseau le plus long du monde. Sa fonction est d’assurer les liaisons entre le centre et les nombreuses villes satellites et zones industrielles qui ont poussé à la périphérie pour accueillir les anciens ruraux. Des bus fonctionnant au gaz ou à l’ sont apparus. Toujours dans la logique de la vitrine, Shanghai a installé le Maglev, un train rapide à suspension magnétique sans contact avec les rails. Il parcourt en 7 minutes les 30 km qui séparent l'aéroport international de Pudong au centre des affaires de Lujiazui.
Le pari du véhicule électrique
La voiture électrique est officiellement encouragée en Chine. Shanghai ne fait pas exception : celui qui acquiert un tel véhicule n’est pas obligé de payer pour obtenir une plaque d’immatriculation, échappant ainsi aux étonnantes ventes aux enchères qui s’appliquent aux autres candidats à l’achat d’une voiture, avec des prix souvent autour de 10 000 dollars. En outre la ville accorde des subventions qui font par exemple baisser le prix de la voiture électrique la plus populaire, la BYD, de 45 000 $ à 32 000 $ environ.
Si le développement de la voiture électrique est encore embryonnaire, en revanche celui des scooters et vélos électriques est en pleine expansion. Les deux roues se glissant silencieusement dans les cités nouvelles ou dans les lilongs de Shanghai (les petites rues des quelques quartiers traditionnels non détruits) sont devenus une image familière de la ville.