1. Le bois, la première des sources d’énergie.
La maîtrise du feu par l’Homme peut être datée en examinant les restes archéologiques, avec les traces d’anciens foyers. Elle remonte sans doute à 500 000 ans avant notre ère en Europe, à 800 000 ans au Proche-Orient, peut-être même à plus d’un million d’années en Afrique. Les hommes préhistoriques utilisent alors la première des : le bois. Ils peuvent désormais se chauffer, s’éclairer, cuire leur nourriture, éloigner les bêtes sauvages. A l’ère du Néolithique ( de – 8 500 ans à – 3 000 ans avant Jésus-Christ ), ils dépassent le stade de la chasse et de la cueillette et commencent à cultiver la terre et domestiquer des animaux. Ceux-ci fournissent une nouvelle source d’énergie pour tracter les charrues et transporter les fardeaux. A la fin du Néolithique, l’espèce humaine va peu à peu maîtriser la force du vent et de l’eau, la du soleil. A chaque nouvelle énergie exploitée, l’humanité enregistre des progrès rapides. Sur la photo, la reconstitution d’une scène préhistorique au Musée national de l’histoire de Mongolie à Oulan Bator.
2. Le vent, à la source de la mobilité.
La construction des bateaux à voile, utilisant la force du vent, va permettre aux hommes d’étendre leurs territoires et de s’ouvrir au monde. La civilisation égyptienne, qui culmine entre -1 500 ans et -1 000 ans avant notre ère, s’installe tout au long du Nil. Sur la photo, une fresque découverte dans la tombe du scribe royal Menna montre une grande barque funéraire qui emporte son corps à Abydos, près de Louxor, au bord du grand fleuve. Dans la même période, les Phéniciens se lancent sur la mer Méditerranée à partir de l’actuel Liban et vont donner naissance au commerce moderne, en assurant des échanges avec des pays de plus en plus lointains. A partir de 1600 avant notre ère, la civilisation chinoise débute elle aussi le long du fleuve Jaune, avant d’établir les « routes de la soie » maritimes et terrestres.
3. L’eau pour bâtir les villes
Le moulin à eau est sans doute plus ancien que le moulin à vent. Il est mentionné dans le “De Architectura” de Vitruve, un grand architecte romain au Ier siècle avant J.-C.. Un bas-relief du IIIe siècle de notre ère à Hiérapolis, en Turquie, décrit une très ancienne machine à eau utilisant un système de bielles et de manivelles. Selon le schéma qui a été reconstitué (voir photo), elle actionnait une paire de scies destinées à couper la pierre. Moulins à aubes et moulins à vent vont se développer dans les siècles suivants et assurer de nombreuses fonctions : pomper l’eau pour le bétail et l’irrigation des terres, scier le bois, fabriquer les huiles et les farines etc… Le moulin à vent devient un élément omniprésent des côtes des Pays Bas, du Danemark, de l’Angleterre, de l’Allemagne, autant de pays qui ont poursuivi la culture de la technologie éolienne.
4. Le soleil, l’énergie concentrée
L’utilisation du rayonnement solaire comme source d’énergie est plus tardive que celle du bois, du vent ou du courant de la rivière. Certes la légende veut qu’Archimède ait su utiliser des miroirs paraboliques pour incendier les vaisseaux romains qui assiégeaient Syracuse en 213 avant J.-C., mais il faut attendre le XVIIIe siècle pour de vraies expérimentations scientifiques. Le Genevois Horace-Benedict de Saussure conçoit en 1774 l’« héliothermomètre », ancêtre du capteur solaire, avec une vitre au dessus d’un caisson isolé et d’un absorbeur de chaleur. Il pense même à l'usage de fenêtres à double châssis pour un bon isolement. Un peu plus tard Antoine Lavoisier expérimente des lentilles qui en concentrant les rayons du soleil permettent de fondre des pièces de métal.
5. Les deux formes du solaire
En 1839, le physicien français Edmond Becquerel, qui a 19 ans (!), met en évidence l’ qui permet de produire de l’ à partir du rayonnement solaire. A noter que son fils Antoine sera un pionnier de la . Mais il va falloir plus d’un siècle pour que sa découverte débouche sur de véritables applications, quand les savants auront posé les bases de la physique nucléaire et inventé les semi- conducteurs. C’est donc les effets calorifiques du soleil que l’on tente d’utiliser à échelle industrielle. En 1878, Augustin Bernard Mouchot construit pour l’exposition universelle de Paris une ingénieuse machine (photo). Elle associait un réflecteur solaire parabolique de 20 m2 à une machine à vapeur placée à son foyer. Mais le rendement est très faible. Les recherches dans le solaire thermique ne résistent pas à la concurrence des combustibles fossiles comme le charbon puis le pétrole, beaucoup plus efficaces.
6. Un précurseur vraiment génial
Un météorologue danois, Poul La Cour (1846-1908), est considéré comme le pionnier de l' . En outre, il s’intéressa très vite à la question du stockage de l’électricité afin de pallier le problème de l’intermittence. Et il pensa à l’ comme vecteur intermédiaire. Un vrai pionnier donc, d’autant plus qu’il jeta aussi les bases de la téléphonie. Avec l’éolien, La Cour cherchait à électrifier les campagnes pour faciliter le travail des ruraux et prolonger l'activité pendant les longues nuits d'hiver, par exemple pour s’instruire. Au début, il chercha à produire l’électricité avec des moulins à vent classiques, très nombreux dans le pays. Puis il constata qu’il était possible d’améliorer l’efficacité des ailes en réduisant leur nombre et en leur donnant un profil de pales.
7. L’éolienne à la recherche de sa forme
La recherche de la bonne forme d’une éolienne fut un long processus… L’Américain Charles F. Brush, né dans l’Ohio, y contribua en construisant en 1888, dans sa maison de Cleveland, ce qui est considérée comme la première éolienne moderne. Mais avec un bien faible rendement : un engin de 36 tonnes d’une capacité de 12 kW (une éolienne moyenne a aujourd’hui une de 2 000 kW). L’échelle est fournie par la personne qui tond la pelouse, sur la droite de la photo…. Les 144 pales sont en bois de cèdre et le grand panneau à gauche est destiné à placer le rotor dans une bonne position par rapport au vent. Brush travailla aussi sur les batteries pour stocker l’électricité produite. Le modèle, simplifié, deviendra une image familière des fermes américaines, où l’éolienne sert à pomper l’eau pour l’irrigation, soit par un piston soit via un moteur électrique.
8. Les barrages de la puissance
Les premiers barrages remontent à l’Antiquité (Égypte, Mésopotamie). Mais il faut attendre la moitié du XIXe
siècle pour voir apparaître les techniques architecturales qui vont assurer leur solidité et le début du XXe siècle pour que de puissantes turbines convertissent la force de l’eau en électricité (on parle de «
blanche »). C’est d’abord le cas dans les Alpes italiennes, françaises et suisses. Le barrage devient un symbole de la puissance d’un État, qui peut ainsi accroître son
et stimuler son économie. Au début des années 1930, les barrages de la Tennessee Valley Authority, lancée dans le cadre du New Deal de Franklin D. Roosevelt, redonnent vie à une misérable région. La jeune Union soviétique multiplie les barrages monumentaux en Sibérie et sur ses grands fleuves (ici à Zaporizhia, sur le Dniepr, en 1932). Le barrage d’Assouan, sur le Nil, est lancé en 1960 par le colonel Nasser, comme une affirmation des jeunes nations décolonisées.
9. Un coût environnemental et patrimonial
Aujourd’hui, l’énergie hydroélectrique est la principale des énergies renouvelables, qui allie puissance et régularité, malgré les variations saisonnières. L’électricité produite est très « pilotable », c’est–à-dire répondant aux demandes de la consommation. Mais la construction d’un barrage perturbe beaucoup l’environnement et la vie des riverains. Ce fut le cas en Chine lors de la construction du plus grand barrage à ce jour, celui des Trois Gorges, sur le fleuve Yangze. Les constructions de barrage en Amazonie ou en Asie du Sud-Est apportent à la fois progrès économique et fragilisation du patrimoine naturel. En France, en 1952, la construction du barrage de Tignes, dans les Alpes, avait secoué l’opinion publique. L’ancien village avait dû être englouti sous les eaux. De nombreuses fermes avaient disparu et le cimetière avait dû être déplacé (sur la photo, les habitants de Tignes transportent les cercueils avant la mise en eau du barrage).
10. Semi-conducteurs, transistor et cellule photovoltaïque
En 1953, les physiciens et chimistes Gerald Pearson, Calvin Fuller et Darryl Chapin réalisent la première cellule solaire à base de , qui transforme les rayons du soleil en électricité. Leur invention dérive directement de leurs recherches sur les semi-conducteurs. Ces derniers sont aussi à la base du transistor, un petit composant qui va révolutionner le monde. Les panneaux photovoltaïques trouvent leur première application dans la conquête spatiale. Six mois après le Spoutnik soviétique, la Marine américaine envoie le 17 mars 1958 dans l’espace le satellite Vanguard I, équipé à la fois d’une batterie électrochimique et de petits panneaux solaires (voir photo montrant le montage sur la fusée). La batterie s’épuise en quelques jours, alors que les cellules solaires se maintiennent pendant des semaines.
11. Le photovoltaique s’envole
Il faut encore attendre une vingtaine d’année pour que le solaire photovoltaïque atteigne un niveau industriel. En 1974, le Japon lance « Sunshine », le premier programme de production d’électricité photovoltaïque. Au début des années 2000, l’Allemagne prend le relais, avant que la Chine, les Etats-Unis, l’Inde se lancent sur le marché, contribuant à une baisse spectaculaire du coût des cellules photovoltaïques. Les parcs photovoltaïques et les installations sur bâtiments se multiplient. Les panneaux solaires se prêtent facilement à une utilisation décentralisée, par exemple en Afrique, dans les zones rurales éloignées des réseaux électriques. Le photovoltaïque a favorisé ainsi l’accès à l’électricité (près de 90 % de la population mondiale aujourd’hui en dispose). La recherche améliore sans cesse le rendement des cellules et leur configuration. Sur la photo, une membrane flexible, destinée à épouser la forme des toitures, est présentée au salon InterSolar de Munich, en Allemagne.
12. Le solaire thermodynamique
Les recherches de Mouchot en 1878 ne sont pas non plus sans héritières. En 1968, Félix Trombe met au point un nouveau modèle, le four solaire d'Odeillo, aujourd'hui encore le plus grand au monde. Le miroir parabolique concentre les rayons lumineux vers le foyer situé dans la tour blanche, assurant des températures de plus de 3 500 °C permettant la fusion du diamant. Mais le pouvoir calorique du soleil peut aussi produire de l’électricité de façon indirecte dans les centrales thermodynamiques. Le principe est le même : des milliers de petits miroirs paraboliques autour d’une tour centrale chauffent un qui fait tourner une turbine. Espagne, Etats-Unis, Afrique du Sud, Maroc ont développé ce type de centrales. La production reste faible (50 fois moins que les parcs photovoltaïques en 2019 dans le monde).
13. L’éolien, de la terre à la mer
Les moulins à vent ont résisté à la machine à vapeur jusqu’en 1900. On en comptait alors 30 000 en France, 18 000 en Allemagne. Après le premier de 1973, les éoliennes apparaissent en force, non plus isolées, mais rassemblées en parcs de plus en plus grands. Leur production électrique n’est plus utilisée localement mais injectée sur les grands réseaux. L’Europe enclenche le mouvement, puis les pays disposant de grands espaces (Etats-Unis, Chine, Inde) donnent à la filière un essor considérable : elle assure en 2018 plus de 5 % de la production électrique mondiale (moins de 2 % pour le solaire). Longtemps à la traîne en raison de ses coûts et des difficultés de maintenance, l’éolien connaît depuis les années 2010 une forte progression. En retard sur l’Europe du Nord, la France privilégie désormais ce type d’éolien mieux accepté par les populations. Sur la photo, la première éolienne flottante française au large de la Turballe, sur la côte Atlantique, en septembre 2018.
14. Biocarburants et biogaz
La est à l’origine des biocarburants et du . Ce dernier est connu depuis la nuit des temps. Ses bulles, provoquées par la décomposition des déchets végétaux et animaux, percent spontanément la surface des marais. Dès 1870, en Europe, des moteurs électriques l’utilisent. Pendant la deuxième guerre mondiale, l’armée allemande, qui n’a pas un accès facile au pétrole, le récupère à partir des fumiers de fermes pour alimenter ses camions. En Inde et en Chine, des millions de petits « digesteurs » permettent aux familles de cuisiner sur des réchauds rustiques. Dans les pays européens, une filière industrielle, encore modeste, s’est constituée pour produire ce biogaz, majoritairement du méthane, à partir des déchets organiques ou des boues d’épuration. Sur la photo, une unité de fabrication dans la banlieue de Pretoria, en Afrique du sud, utilise le fumier de bétail.
15. Les centrales du futur ?
« Qu’est-ce qu’on brûlera à la place du charbon ? L’eau, répondit Cyrus Smith. L’eau décomposée en ses éléments constitutifs par l’électricité, qui sera devenue alors une force puissante et maniable ». En 1875, dans « L’île mystérieuse », Jules Verne envisage, via son héros, que l’hydrogène devienne le carburant du futur. Un hydrogène « propre », obtenu par électrolyse de l’eau, peut être utilisé dans une pour générer de l’électricité ou recombiné pour produire du gaz. Il pourrait alors devenir un nouveau carburant, produit, transporté, échangé dans le monde entier, comme le sont aujourd’hui le pétrole ou le gaz naturel. L’image montre la maquette d’une unité de production d’hydrogène par électrolyse exposée au centre de recherche de Toshiba à Tokyo.