Inde : la difficile transition énergétique des pays en croissance
Lecture 10 min
L’Inde a engagé un impressionnant programme d’ . Mais sa consommation de charbon et de pétrole va continuer à croître dans les années à venir. C’est l’illustration de la difficulté à engager une quand la pression démographique et l’aspiration à un meilleur niveau de vie font que la demande en énergie ne cesse d’augmenter.
© SAM PANTHAKY / AFP - Une image de la transition énergétique de l’Inde : un paysan du village de Vahelal, près d’Ahmedabad, se protège du soleil sous des panneaux photovoltaïques.
Un géant démographique en pleine croissance
Avec 1,3 milliard d’habitants, l’Inde est le deuxième pays le plus peuplé du monde, derrière la Chine. Elle devrait dépasser sa voisine asiatique et atteindre 1,5 milliard vers 2030. En 2035, l’Inde ambitionne d’être dans le « top 5 » des économies mondiales, avec un accroissement important de ses classes moyennes. L’expansion et la modernisation des villes a été spectaculaire. Dans les campagnes, selon un rapport de l’AIE1, plus de 500 millions d’habitants ont, dans les vingt dernières années, été branchés à un réseau électrique. Contrairement à l’Afrique, le pays a réglé à peu près complètement cette question de l’accès à l’ , essentiel au développement.
Cet essor démographique et économique fait que le sous-continent indien a un besoin sans cesse croissant d’énergie. La consommation d’énergie primaire a doublé depuis 1990 et devrait encore doubler d’ici 2040. La consommation d’électricité devrait être multipliée par 3, d’autant plus que le
va accroître les besoins en climatiseurs. Une progression impressionnante en valeur absolue même si, par habitant, la consommation reste le tiers de la moyenne mondiale.
La dépendance au charbon et au pétrole
Le indien est dominé à 55 % par le charbon, suivi du pétrole (30 %) et du gaz naturel (près de 8 %), ces deux dernières ressources étant pour la plus grande partie importées. Le charbon assure 75 % de la production électrique.
L’Inde possède les cinquièmes plus importantes réserves de charbon dans le monde, et dispose donc d’une source locale, bon marché, qui emploie des millions d’ouvriers non qualifiés. Le gouvernement tente de promouvoir le gaz, moins polluant, dans les centrales thermiques qui produisent l’électricité, mais cela est difficile pour des raisons de coût et de stabilité sociale.
Pourtant le gaz naturel progresse dans un secteur très consommateur d’énergie, à savoir le chauffage et la cuisson des aliments. Les Indiens utilisent massivement la
, notamment le bois, ce qui pose des problèmes de déforestation et de santé en milieu rural. La situation est pire en milieu urbain, en raison des centrales au charbon en périphérie des villes et de la circulation en forte croissance. La pollution a atteint des niveaux alarmants dans la capitale New Delhi. Le taux de particules fines y est le plus élevé du monde, selon l’OMS (Organisation mondiale de la santé).
Réduire les émissions de CO2
Les émissions de gaz à de l’Inde ont triplé entre 1990 et 2018, celles du monde entier augmentant de 67 %. Elles pourraient doubler d’ici 2030, et dépasser celles des États-Unis, si le modèle de développement n’est pas profondément modifié. L’Inde a été longtemps réticente à des engagements internationaux sur le climat, faisant valoir les besoins de sa croissance et pointant du doigt la responsabilité historique des pays riches.
Mais les effets potentiellement désastreux du réchauffement climatique sur le régime des moussons, la fonte des glaciers himalayens, les inondations et cyclones à répétition l’ont persuadée de s’engager résolument dans la réduction de ses émissions
Pour y parvenir, l’Inde s’efforce de promouvoir le gaz par rapport au charbon et de développer les véhicules électriques (surtout les toutes petites citadines comme la « Tata Nano », les bus, les taxis et les innombrables deux-roues et rickshaws qui congestionnent les métropoles indiennes). Le pays fait des efforts pour améliorer l’ . Comme dans beaucoup de pays qui ont de gros besoins de croissance, l’Inde se réfère à un indicateur autre que les émissions en chiffres absolus : celui de l’intensité carbone du PIB2. Celle-ci devrait être réduite d’au moins un tiers d’ici à 2030 par rapport au niveau de 2005.
L’essor des énergies renouvelables
Cela passe notamment par des objectifs ambitieux en matière d’électricité renouvelable (éolien, solaire photovoltaïque, hydraulique). Celle-ci représente en 2019 une part de 17 % du (dont plus de la moitié d’hydroélectricité). L’objectif est de passer cette part à près de 40 % d’ici 2030.
Ce volontarisme se traduit notamment par la mise en place de très grands parcs solaires, comme la centrale photovoltaïque de Kamuthi, dans le Tamil Nadu, dans le sud-est de l’Inde (648 MW de
maximale), qui fut un moment la plus grande du monde. Il est à noter que les 2,5 millions de panneaux solaires sont nettoyés par des robots, qui solutionnent ainsi le problème de la poussière, endémique dans les campagnes indiennes.
Le nucléaire
L’Inde développe également son parc nucléaire, qui permet une énergie « non carbonée ». Disposant d’une très ancienne expérience dans le secteur militaire, l’Inde développe sa propre technologie et mène des recherches actives sur les réacteurs de 4ème génération (réacteurs à neutrons rapides).
Sources :
- Rapport de l’Agence internationale de l’énergie – India 2020
- L'intensité en carbone d'une économie est le rapport entre ses émissions de CO2 et son PIB. L’objectif est de la réduire au maximum, en ayant des émissions faibles tout en maintenant une forte croissance.