Le digesteur de méthanisation : comment ça marche ?
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La est une opération qui permet de produire du à partir de la de matières organiques végétales ou animales ou de boues de stations d’épuration d’eau. La « digestion » de ces matières s’effectue au sein d’un équipement central dans les unités de méthanisation, appelé « digesteur » ou quelquefois « réacteur à biogaz » ou « méthaniseur ».
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Le digesteur est une cuve dont la taille et l’apparence varient beaucoup selon l’usage qui en est fait. Un digesteur « domestique », destiné à traiter les déchets ménagers d’une famille, pourra faire moins d’un mètre cube, une tour de industrielle dépassera facilement 5 000 m3. Dans une exploitation agricole ou d‘élevage, une taille de quelques dizaines de m3 sera la plus fréquente.
Le principe de fonctionnement de la méthanisation
Le principe est le même pour tous les types de méthanisation.
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Le chargement
Un substrat, formé de matières solides ou liquides, est homogénéisé puis introduit via une trémie dans une cuve cylindrique, dans un milieu sans oxygène (milieu dit « »). Il peut s’agir de résidus de céréales (les plus efficaces), de mélasse, de graisses animales, de déjections de bovins ou de volailles, d’ordures ménagères ou de boues de stations d’épuration. - La
Cette est chauffée, autour de 37-38 °C (dans certains cas à plus de 50 °C), en étant agitée régulièrement. Sa fermentation, pendant au moins 20 jours, aboutit, après diverses transformations chimiques provoquée par des bactéries, à la production d’un . Celui-ci est constitué entre 40 et 70 % de méthane (CH4), le même que le gaz naturel extrait des gisements d’hydrocarbures. Le reste est constitué de (CO2), avec des traces de soufre.
- L’utilisation du biogaz
Ce biogaz est soit utilisé localement dans une chaudière de (qui produit et ) ou bien purifié (au travers de membranes) pour en extraire le méthane injecté dans le réseau public de gaz ou utilisé comme .
- L’évacuation
Ce qui reste, le , est constitué des matières résiduelles après la transformation du substrat. Il est généralement utilisé comme engrais.
Ce digesteur s’intègre dans une unité de méthanisation qui comporte plusieurs équipements : un espace de stockage et de tri des matières, un gazomètre pour stocker le gaz, une chaudière de cogénération, un local technique pour suivre les diverses opérations.
La production de biogaz reste faible par rapport aux besoins de gaz : en Europe, il représente, en 2015, 4 % de la consommation de gaz naturel.
Les différents types d’unités de méthanisation
Le méthaniseur agricole
Dans les exploitations agricoles ou les élevages, les résidus de cultures et les fumiers - et parfois les déchets de collectivités voisines - sont collectés dans une fosse en béton à demi enterrée qui est recouverte d’une bâche étanche. Le biogaz s’accumule provisoirement sous la bâche avant d’être évacué vers une cuve de stockage avant son utilisation. Le digestat obtenu peut-être réinjecté dans la cuve pour un nouveau processus ou utilisé comme amendement par épandage dans les champs. Les opérations nécessitent une surveillance quotidienne pour contrôler les opérations et assurer la sécurité des tuyauteries de gaz. Les unités peuvent être de puissances très diverses, autour d’une moyenne de 200 kW en France. Voir exemple ci-dessous.
L’usine de méthanisation
Les unités industrielles sont destinées à traiter des tonnes de déchets ménagers ou industriels (usines agroalimentaires, papeteries, etc…), collectés dans des dizaines de communes, ce qui impose un tri pour isoler les matières organiques de tous les déchets solides (plastiques, emballages, etc…) qui peuvent s’y mêler. Les matières organiques une fois broyées entrent dans des tours métalliques qui peuvent dépasser 30 mètres. Le gaz produit est stocké dans un gazomètre. L’unité est souvent couplée à une zone industrielle qui utilise le gaz ou l’électricité produite. Les unités centralisées ont en France une puissance électrique moyenne de 1 200 kW. Le coût des investissements, les charges d’exploitation élevées, le coût d’accès au réseau de gaz rend impossible l’injection pour les petites unités de production.
La station d’épuration et le traitement des boues
Les eaux usées, domestiques et industrielles, sont traitées dans des stations d’épuration. L’eau claire est rejetée dans les rivières tandis que restent des « boues » qui, après épaississement, peuvent produire du biogaz, même si elles n’ont pas le rendement des déchets agricoles et des fumiers. Elles sont traitées dans de grandes cuves couvertes d’un dôme métallique. Le flux de ces boues est continu et de grands agitateurs les remuent en permanence.
La micro-méthanisation
Il est possible d’installer des unités de très petites tailles (en dessous de 50 kW), utilisables au niveau d’un quartier, d’une collectivité, d’un restaurant ou même d’une simple famille. Certains fabricants ont baissé les prix de digesteurs domestiques à quelques centaines d’euros, avec des enveloppes en plastique pour la fermentation et le stockage du gaz. Certains sont couplés à des groupes électrogènes pour produire de l’électricité. Mais le fonctionnement est très contraignant, avec une mise en route lente de plusieurs semaines et le nécessité de l’entretenir en permanence. Dans les pays où l’accès à l’énergie est difficile, des installations artisanales sont fréquentes pour se chauffer, cuisiner ou s’éclairer. En Chine plus de 40 millions de foyers sont ainsi équipés de méthaniseurs domestiques.
La méthanisation est-elle financièrement profitable ? L’exemple d’une ferme
Prenons le cas d’un élevage français de 140 vaches laitières. Il produit environ 1 400 tonnes de fumier par an qui alimente une unité de méthanisation d’une puissance de 55 kW. Sur un an, cette unité produit 281 000 kWh d’énergie thermique (chaleur) et 117 000 kWh d’électricité.
La chaleur est utilisée pour le chauffage des étables et des autres bâtiments de la ferme. L’électricité a deux usages principaux :
- alimenter les installations nécessaires à l’élevage des 140 vaches, soit près de 60 000 kWh par an ;
- alimenter l’unité qui produit le biogaz et le transforme, soit 8 000 kWh
Il reste 49 000 kWh électriques qui sont revendus à EDF. Le tarif de rachat de l’électricité est fixé chaque année. Dans l’exemple, l’éleveur a touché 10 780 €, provenant de la revente et de diverses primes.
L’exploitant a par ailleurs fait des économies en utilisant pour son exploitation l’électricité et la chaleur qu’il a lui-même produites. Celles-ci se montent à 8 400 €.
Au total, il a donc « gagné » un peu plus de 19 000 € dans l’année. La mise en place de son unité de 50 kW lui a coûté environ 300 000 € au départ. Son temps de retour sur investissement est de 15 ans. Ensuite, après déduction des frais de maintenance, il récupérera des revenus complémentaires.